Les recettes d’encre de Ruscelli

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Parmi d’autres recettes, les Secrets du seigneur Alexis Piemontais contiennent de nombreux procédés pour fabriquer des teintures, de la couleur et des encres. Voici les principales.

Pour faire purpurine, qui est une couleur avec laquelle on fait couleur d’or pour peindre et pour escrire.

Fais fondre une livre de fin estain, et fondu qu’il soit, tire le jus du feu, et y mets huit ou dix onces de vif argent: mesle bien le tout ensemble qu’il soit comme une paste, puis prens une livre de soufre et une livre de sel armoniac tres bien broyez. Incorpore les tous avec ladite paste d’airain, et d’argent vif, et les broye tres bien ensemble en un mortier, non autre vaisseau de bois, ou de pierre, et non d’airain. Puis  mettras toute ceste composition en quelque phiole, laquelle doit estre bien lutee par la bouche, ou emplastree, de sorte que la luture surpasse d’un doigt ou deux. Apres le mettras ainsi sus le fourneau, luy faisant petit feu du commencement et apres un peu plus grand: et ainsi l’entretiendras, en mouvant parfois d’un petit baston ce qui est au verre. et quand tu verras qu’il sera couleur jaune, tu osteras le feu et le laisseras refroidir, si auras la purpurine tres belle, comme couleur d’or: en apres tu la broyeras avec de la lessive, et la laveras d’urine ou de lessive, y adjoustant un peu de safran, et la destremperas avec l’eau gommee, comme verras cy apres plus clairement.

p. 720 : Pour faire du verd pour escrire et paindre.

Pren verd de gris, litarge, argent vif: broye bien tout ensemble avec urine d’enfant: puis en escris ou pains et verras une couleur excellente, comme d’esmeraude.

p. 720-721 : Pour broyer l’or fin, duquel on puisse paindre ou escrire avec le pinceau

p. 723 : Poue faire lettres de couleur d’or, sans or

Prend une livre d’estain, deux livres d’argent vif et les fonds ensemble, puis les broye avec de l’eau gommée, puis en escrits.

p. 723 : Pour faire lettres verdes.

Pren jus de rue, verd de gris et safran: broye bien tout ensemble, et en escrits avec de l’eau gommée.

p. 723 : Pour faire lettres blanches en champ noir

Pren du laict du figuier pur en un verre, et le mets au Soleil, par l’espace de demie heure, puis le destrempe avec de l’eau gommee, quand tu le voudras mettre en oeuvre. Apres avoir escrit, tu noirciras le papier d’ancre, c’est à dire autant que tu voudras que le champ soit grand. Et quand il sera sec, tu le frottera tres bien d’un linge. Lors les lettres que tu auras faites avec le laict de figuier, s’enleveront toutes, et demourera le papier blanc escrit, pour avoir esté preservé par ledit laict. Le mesme pourras faire avec le jaune d’un oeuf destrempé en eau, duquel tu escriras: et quand l’escriture sera seche, frotte bien tout le papier d’ancre, comme dessus. Et lors qu’il sera sec, frotte lesdites lettres, faite de jaune d’oeuf, avec quelque linge ou cousteau, et elles s’en iront, et laisseront l’espace blanche: dont auras tres belles lettres en champ noir.

On trouve aussi une recette pour fabriquer de l’encre verte dans les Secrets. Cette recette sert à la fois pour fabriquer de l’encre à écrire ou pour peindre.

Pren verdet, et le detrempe seul en vin-aigre, et le passe par un linge, et le broye tresbien sus le porphyre avec de l’eau claire, et y mets, en le broyant, un peu de miel, et le laisse bien secher: puis broyeras derechef tresbien avec eau gommée, et sera fait.

Pour le bleu, voici la recette:

L’asur se broye avec du miel comme le verdet, mais il n’est ja besoin de le purger autrement: detrempe le avec clair d’oeufs, batus, ou avec eau de cole, et non pas de gomme. L’eau de cole se fait de cole de parchemin, bien claire et mollifiée, et coulée comme la gomme.

Orientation bibliographique sur Alexis piemontais

Nora Jimenez, « Alexis de Piémont dans le monde hispanique, popularisation de la science ? », dans Colloques, congrès et conférences sur la Renaissance européenne, n° 45, Paris, Classiques Garnier, 2007.

Massimiliano Celasch, I Secreti di Alessio Piemontese – Appunti di lavoro e risorse digitali [Complemento a Da Girolamo Ruscelli a Alessio Piemontese.I Secreti dal Cinque al Seicento, Manziana, Vecchiarelli, 2015].  Archivio – Cinquecento Plurale, dernière révision en 2016. Consulté le 22 décembre 2015 : http://dsu.uniroma3.it/cinquecentoplurale/wp-content/uploads/2018/11/I-Segreti-di-Alessio-Piemontese.pdf . Ce complément donne d’autres éléments pour une bibliographie portant à la fois sur les éditions de texte et sur l’historiographie des livres de secrets.

William Eamon, « Books of Secrets in Medieval and Early Modern Science », Sudhoffs Archiv, vol. 69 / 1, Franz Steiner Verlag, 1985, p. 26‑49.

Pierre Julien, « L’identité d’Alexis le Piémontais définitivement établie ? », Revue d’Histoire de la Pharmacie, vol. 69 / 251, Persée – Portail des revues scientifiques en SHS, 1981, p. 279‑279.

Gianni Mombello, Sur les traces d’Alexis Jure de Chieri: le problème des francisants piémontais au XVIe siècle, Genève, Slatkine, 1984.

Z. Bela, « [Who really is an author of Alexis of Piemont’s secrets] », Archiwum Historii I Filozofii Medycyny, vol. 57 / 1, 1994, p. 3‑14.